Agenda Ironique du mois de décembre

C’est avec plaisir que j’accueille sur mon blog l’Agenda Ironique de décembre!

Un Agenda hivernal… Allez, on se calme, on se pose. L’heure est au ressourcement (que ceux qui aiment le grog et le vin chaud lèvent la main…) Prenons exemple sur la nature : elle s’est repliée dans le secret de la terre et reprend des forces avant l’explosion du printemps. Tout est là, bien en vie mais aussi bien caché…

Pour l’Agenda Ironique du mois de décembre, je propose donc comme thème : « Mondes invisibles »

Nouvelles, poèmes, contes, images… Lèverez-vous un coin du voile? Quel sera votre monde invisible?

Les dates? Disons qu’elles rimeront avec réveillon : Jusqu’au 24 pour envoyer les textes, votes du 25 au 30, proclamation des résultats le 31 décembre.

Petites précisions pour ceux qui n’auraient encore jamais participé : les textes devront être publiés sur vos blogs respectifs, en indiquant qu’ils participent à l’Agenda Ironique du mois de décembre, et leurs liens envoyés en commentaire du présent article.

Et merci à tous de m’avoir attendue pour ce dernier Agenda de l’année!

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102 réflexions sur « Agenda Ironique du mois de décembre »

  1. Mon texte est invisible pour l’heure… Je n’ai découvert ton défi qu’hier. J’envoie les Rois Mages ou le Père Noël te l’apporter… demain, si les vents sont favorables. Ca le fait quand même?

    1. Aie! Je suis en train de rédiger la présentation des textes. Et c’est le seul moment que j’aurais aujourd’hui pour le faire… Si tu as quelque chose à m’envoyer dans l’heure qui vient, ça le fait, sinon…
      Mais j’oubliais : joyeux Noël!

      1. Le mimosatier

        Dans la anse Méjean, sur la commune de Toulon, il existe un petit village de pêcheurs réunissant, ma foi, peut-être une cinquantaine de cabanons. C’est un haut lieu préservé de Méditerranée, semblable aux villages de pêcheurs d’autrefois,qu’on trouve encore sur le littoral portugais et dans les îles grecques des Cyclades tout particulièrement. La modernité n’y a pas sa place. Chaque privilégié qui hérite d’un cabanon se fait fort de préserver un art de vivre où la sieste, la contemplation de la mer et des étoiles , l’apéro sont des composantes essentielles. On y vit avec le minimum sur le dos, loin des bruits de la ville pour mieux écouter le chant des goélands et la musique des vagues sur la grève. Pas de commerces, pas de carte bleue, on vient profiter de la vie et de l’espace dans une simplicité monacale de joyeux bénédictins.

        Parmi ces constructions assez sommaires, l’une se distingue parce qu’elle est la seule à être construite avec un étage. Elle est légèrement à l’écart, au bord de l’eau, à l’extrême droite du micro port. Ses murs sont rose alors que les autres cabanons offrent un camaïeu de bleu ciel et de blanc. Dernière particularité: un mimosatier assez vigoureux a poussé à environ deux mètres à l’arrière la maison, près d’un étonnant bassin-lavoir qui recueille les eaux de pluie plutôt rares au demeurant. On n’y a installé l’électricité assez récemment; jusqu’alors, on s’éclairait à la lampe tempête et à la lampe à pétrole. On cuisinait le poisson sur des réchauds à gaz ou , le plus souvent, on le faisait griller au charbon de bois.

        Cette maison appartenait à mon oncle et à ma tante et, minot, j’y passais mes vacances, des vacances enchanteresses, entre baignade et pêche, sous ce décor partagé par les pins parasols et la lumière rieuse de la mer et du ciel. C’était le temps si précieux de l’absence de contraintes et de soucis, d’un présent gourmand, pleinement heureux.Jusqu’au jour où…

        Jusqu’au jour où un événement anodin en apparence entraîna des conséquences surprenantes, disproportionnées et, au final, incontrôlables, stupéfiantes, voire dramatiques. A l’époque, je dormais dans une petite pièce aménagée avec un simple lit de camp: pour un gamin, cela donnait sur air de vacances supplémentaire. Le sol de la petite chambre n’était pas plat et mon oncle m’avait expliqué que c’était à cause des racines du mimosatier qui s’étaient infiltrées sous la maison. Le mimosa, c’est un enchantement de boules duveteuses qui éclatent en janvier-février comme autant de bulles de champagne dans l’azur. Le mimosatier – les mimosatiers devrais-je dire puisqu’il en existe plusieurs centaines de variétés- est originaire d’Australie. Ca pousse comme du chiendent et les racines plongent profond pour trouver de l’eau et de quoi se nourrir.

        Le premier signe d’une présence des forces obscures et silencieuses d’un monde mystérieux et parallèle se manifesta une nuit des plus ordinaires. Je me réveillai sans appréhension, à cause d’un tremblement , d’une légère secousse qui ébranla la pièce où je dormais pendant une seconde ou deux. Dans mon demi-sommeil, je n’eus même pas le temps ni l’idée d’avoir peur. Je m’interrogeai tout juste sur la cause du phénomène: coup de tonnerre d’un orage à naître, vague géante d’une sorte de mini tsunami qui s’était fracassée sur les murs-forteresses de l’habitation? Aucune réponse. Je replongeai aussitôt dans les profondeurs d’un sommeil lourd.

        Le lendemain, au matin, je me rendis compte que le sol de ma chambre s’était modifié. Des carreaux de gré s’étaient soulevés, d’autres s’étaient fendus en deux. J’en averti mon oncle au petit déjeuner. Immédiatement, il constata les dégâts. Personne d’autre que moi n’avait perçu la secousse nocturne que l’on mit en premier lieu sur le compte d’une petite secousse tellurique comme il s’en était déjà produit de temps à autre. En général, ces secousses étaient de si faible intensité que seuls les sismographes enregistraient leur manifestation, de l’ordre du simple frisson d’un dragon.

        Mais bien vite, mon oncle comprit que le responsable de ce bouleversement avait une cause plus prosaïque: les racines du mimosatier. Pas d’autre choix possible pour éradiquer le mal: abattre l’arbre et déraciner la souche pour éviter qu’un jour ou l’autre elle ne mette la maison à terre ou la pousse inéluctablement vers la mer. Ca fait toujours mal au coeur de couper un si bel arbre mais il n’y avait pas le choix. Alors l’oncle opéra sans état d’âme à la tronçonneuse , réduisit le mimosatier en fagots dont il se débarrassa immédiatement par le feu.

        Mais pour la souche et les racines, ce fut une toute autre histoire. Mon oncle dut creuser sur une profondeur de plus de deux mètres. Il y passa plus d’une journée et demie. Exténué, il ne voulait pas que la moindre repousse puisse avoir lieu. Alors qu’il pensait être venu à bout de l’hydre de racines, sa botte se coinça dans un dernier enchevêtrement de tentacules. Il eut toutes les peines du monde à s’extirper de là. Il était prêt à sacrifier sa botte lorsqu’il sentit une brûlure sur sa jambe, juste derrière le genou. Il compara par la suite la piqûre à celle d’une méduse ou d’une vive. J’assistai à la scène, impuissant. Pendant quelques secondes, nous eûmes l’impression qu’une aspiration venue des entrailles de la terre et de l’eau voulût entraîner mon oncle dans un tourbillon abyssal de boue.

        Mon oncle finit par avoir le dessus. « N’en parlons à personne. Cela doit rester un secret entre toi et moi, m’indiqua-t-il en portant un doigt à ses lèvres. Inutile d’affoler qui que ce soit. Cependant, lorsqu’il releva la jambe de son pantalon pour calmer la douleur, la jambe portait bel et bien des traces de ventouses, comme si une pieuvre géante s’était échappée du Vingt mille lieues sous les mers de Jules Verne. C’était totalement improbable, parfaitement irrationnel et pourtant… Quel monde invisible nous côtoyait, nous surveillait peut-être, quelle force informe nous adressait un message incompréhensible?

        Nous étions encore sous le coup de ces interrogations, qu’un second signe nous fut adressé. Le bassin de rétention d’eau était fendu, inutilisable. L’hypothèse de la secousse tellurique revient à la surface. Mon oncle s’attela à déplacer ce bloc de pierre creusé à la manière des sarcophages, sépultures fréquentes au Moyen-Age et souvent reconverties depuis en bacs à fleurs. Sous ce bassin, surprise, de nouvelles résurgences du mimosatier, trop faibles cependant pour expliquer l’éclatement de la pierre.

        Mais on ne pouvait laisser les choses à moitié. L’oncle, avec une prudence inquiète, retira les racines sur près d’un mètre de profondeur. Là, il tomba sur une forme oblongue prise dans un nouveau lacis tentaculaire dense. Il dégagea à coup de son couteau de berger un objet étrange d’une cinquantaine de centimètres reconnaissable entre mille mais totalement impensable en ce lieu humide et qui aurait dû être détruit dans ce milieu: une momie!

        Momie d’enfant? Momie de chat ou d’un petit animal? . On fit venir un spécialiste du Muséum d’histoire naturelle qui après une semaine rendit un verdict plus inattendu encore: momie de … sirène! De quoi devenir fou! Quel combat ou quelle protection se livraient le monde végétal et le monde marin pour unir leurs bras, leurs racines, leurs tentacules? Pourquoi cette momie à cet endroit? On sait que les sirènes ne sont pas des personnages de Disney mais des êtres à qui l’ont a jeté un sort et qui tentent de s’en délivrer en les transmettant à d’autres. Rappelez-vous le brave Ulysse et ses compagnons?

        On ébruita d’autant moins l’affaire que la sirène disparut le lendemain de son identification possible. Vol? destruction? Résurrection? Qui avait intérêt à cette disparition? Les mondes invisibles nous côtoient mais nous ignorent le plus souvent. N’est-ce pas preuve d’une grande sagesse?

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